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10 septembre 2018 1 10 /09 /septembre /2018 08:00

Notre prochaine conférence : « Apprendre l'anglais facilement. De nouvelles pistes. », aura lieu le jeudi 13 septembre au Chalet Gourmand, de 18 h à 20 h, 198 Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, à Gujan-Mestras. Entrée gratuite mais réservation conseillée au 05 56 54 67 38.
Le Chalet Gourmand redeviendra un restaurant à 20 h pour ceux qui veulent poursuivre autour d'un repas.

Dans cette conférence, Frédéric Rava-Reny, enseignant chercheur en sciences cognitives, fera part de ses derniers travaux en ouvrant à son habitude de nouveaux horizons : de quoi donner de l'espoir avec du concret pour les élèves.

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Published by gestionmentale.org - dans Anglais Conférences
11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 11:00

« Il n'y a rien de noble à être supérieur à vos semblables. La vraie noblesse est d'être supérieur à celui que vous avez été auparavant. » Que cet adage soit d'Ernest HEMINGWAY ou qu'il soit de SHELDON (https://quoteinvestigator.com/2017/03/11/superior/), il illustre un point de vue de « recordman ».
Qu'est-ce que cela veut dire ?
Quand nous réfléchissons (au sens précis du geste de réflexion), nous confrontons une situation à une loi, et nous comparons les deux pour savoir si elles sont identiques.
La loi, c'est ce qui sert de référence. Lorsque les autres servent de référence, nous sommes sur le versant « compétitif » du geste. Nous cherchons alors, sur le plan cognitif, à dépasser les autres. C'est une saine émulation. Les élèves qui ont cette habitude de penser ont intérêt à se trouver dans des classes fortes car ils veulent être premiers.
Lorsque c'est nous-même qui faisons office de référence, nous sommes sur le versant « recordman » du geste. Nous cherchons alors, sur le plan cognitif, à nous dépasser. Ils se reconnaîtront dans l'adage attribué (faussement) à Hemingway. Les élèves qui ont cette habitude de penser ont intérêt à se trouver dans des classes où les enseignants donnent des notes, afin de savoir s'ils progressent ou non.

Pour chaque aspect de la pensée il existe des adages : à nous de les collectionner !
 

 

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29 mai 2018 2 29 /05 /mai /2018 13:00

Extrait de dialogue entre un jeune collégien et moi-même.
- Je ne peux pas être attentif à ce cours, cela ne m'intéresse pas.
- Oui et alors ?
- Eh bien on ne peut pas être attentif à quelque chose qui ne nous intéresse pas.
- Ah bon ?...
- Ben oui.
- Mais comment sais-tu que quelque chose ne t'intéresse pas si tu ne la connais pas ?
- Je la connais déjà, je sais que cela ne m'intéresse pas.
- La première fois que tu l'as rencontrée, savais-tu que c'était inintéressant ?
- Non puisque je ne la connaissais pas encore.
- Donc pour la connaître tu as été obligé d'y être attentif.
- Oui, c'est vrai.
- Et ensuite, mais ensuite seulement, tu t'es rendu compte que cela ne t'intéressait pas.
- C'est ça.
- Donc tu as été attentif d'abord et ensuite tu n'as pas été intéressé.
- Oui.
- Donc l'attention est toujours avant l'intérêt, ou le désintérêt. Pour savoir si quelque chose est intéressant ou non, nous devons d'abord y prêter attention. Par contre, tu as raison, lorsque quelque chose nous intéresse, cela permet de soutenir notre attention.
Comme c'est beaucoup plus facile d'être attentif à quelque chose qui nous intéresse, nous avons l'impression que l'intérêt arrive en premier, alors que c'est toujours l'attention.

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28 mai 2018 1 28 /05 /mai /2018 11:00

L'ennui en cours peut venir de nombreux facteurs.
Pour le combattre, nous pouvons utiliser l'intérêt. Peut-être avez-vous remarqué que lorsque quelque chose nous intéresse, nous en avons beaucoup de souvenirs. L'intérêt engendre un grand nombre de souvenirs. Cela marche aussi dans l'autre sens : un grand nombre de souvenirs génère de l'intérêt. C'est comme un cycle, bien naturel pour une pensée en mouvement (geste mental = pensée en mouvement).
Par exemple, lorsque nous commençons à apprendre une langue étrangère, comme l'anglais, nous connaissons peu sur cette langue : nous avons peu de souvenirs en stock qui nous permettraient de comprendre cette langue. Du coup, si nous écoutons une discussion en anglais, assez rapidement, cela devient ennuyeux car nous n'y comprenons rien.
Par contre, en apprenant davantage de vocabulaire et de grammaire, donc en fabriquant des souvenirs, nous pouvons suivre plus longtemps la discussion qui, comme par enchantement, devient plus intéressante, moins ennuyeuse.

En résumé : plus on fabrique de souvenirs, moins on s'ennuie. Et moins on fabrique de souvenirs, plus on s'ennuie.

Fabriquer des souvenirs est donc souverain pour lutter contre l'ennui. C'est le premier travail de l'élève.

Mais comment fabriquer des souvenirs ?... Il y a au moins une trentaine de façons répertoriées, s'appuyant sur les éléments de base de la pensée. À chacun d'en faire une collection pour survivre en classe dans toutes les situations.

Ou presque. Car il y a une situation terrible : celle où le professeur submerge d'informations l'élève et l'empêche ainsi de fabriquer des souvenirs !
Par exemple, ces enseignants qui parlent du début jusqu'à la fin du cours aussi vite qu'une mitraillette tire ses balles. Les malheureux élèves doivent écrire à un rythme infernal, sans avoir le temps de penser un instant à ce qu'ils transcrivent... Que faire dans ce cas-là ?... La marge de manœuvre est très réduite.
Il faudrait déjà bien connaître le cours afin de comprendre ce que l'enseignant montre ou raconte et en fabriquer un souvenir durable. Cela nécessite un sérieux entraînement que la plupart des classes n'ont pas. Ou de récupérer le cours avant pour suivre plus facilement : les manuels peuvent aider.
Dans l'immédiat, avec ce genre de professeurs, l'ennui est inévitable ou presque. Une échappatoire rapide existe : ne pas avoir à noter le cours et essayer de comprendre.
Autrement, il faut s'entraîner à fabriquer des souvenirs plus rapidement : augmenter sa mémoire, déployer sa compréhension, afin de capter le maximum d'informations en cours. Mais comme tout entraînement, cela prend du temps.

Parce qu'il est impossible d'y fabriquer des souvenirs, ces cours resteront ennuyeux.

Mais dans toutes les autres situations, il y a des solutions plus simples !... Nous les verrons une autre fois.

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26 mai 2018 6 26 /05 /mai /2018 07:30

Quel point commun entre Einstein, Archimède, Newton et Ampère ? Oui, ce furent tous quatre des génies des sciences, mais il y a autre chose. Chacun a utilisé la faculté de s'imaginer soi-même dans la situation qu'il voulait comprendre. Einstein s'est imaginé lui chevauchant un rayon lumineux, et trouve la théorie de la relativité. Archimède se met dans le bain et devient lui-même l'objet qui flotte et subit la poussée (d'Archimède). Newton allongé sous un pommier reçoit sur sa tête la pomme et découvre la loi de la gravitation. Ampère s'imagine être lui-même le courant électrique et découvre les lois de l'électricité...

Se mettre soi-même à la place d'une chose permet de développer l'intelligence et de découvrir des aspects inconnus de la réalité.

C'est la même chose quand on se met soi-même à la place de quelqu'un d'autre : cela développe l'intelligence et nous fait découvrir des aspects inconnus de la vie.
Et en plus on se fait des amis. C'est pas génial ?...

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25 mai 2018 5 25 /05 /mai /2018 10:00

 

Hormis les considérations morales sur le fait de tricher, qui peuvent nous amener à des questions difficiles, du style : « Pourquoi c'est mal de tricher ? (en plus tout le monde le fait) », il y a d'autres aspects à prendre en compte dans la triche.

Imaginons que nous trichions à un examen, et que nous l'obtenions. Bien sûr, nous serons contents de l'avoir. Mais il y a un prix à payer. Comment savoir si nous avons réussi grâce à notre tricherie ou grâce à notre travail personnel ? Nous courons le risque, grandissant année après année, de douter de nous, de ne pas trop savoir si nous sommes bien à notre place.

En trichant, c'est notre image de soi que nous mettons en jeu : avec le temps, le doute va s'installer et notre confiance en soi sera attaqué. Cela en vaut-il vraiment la peine ?...

 

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24 mai 2018 4 24 /05 /mai /2018 11:00

Au détour d'un dialogue avec un jeune élève de seconde, je lui dis que le secret de la mémorisation est de donner un avenir à son souvenir.

Par exemple, nous souhaitons mémoriser une formule pour un contrôle mardi prochain. Pour ceux qui se projettent dans le futur, ils fabriquent un souvenir de la formule, et ils envoient ce souvenir au moment ou à l'endroit où ils en auront besoin. Ils s'imaginent au moment du contrôle en train de se souvenir de la formule. Ou bien ils donnent une mission à leur formule, celle de les rejoindre plus tard.

Ce jeune me répond alors...
- Oui, je comprends ce que tu dis. Mais je ne vois pas les choses comme ça. Pour moi, la mémoire, ce n'est pas un saut dans le temps, c'est un prolongement. Le souvenir que je viens de fabriquer se prolonge jusqu'à l'endroit où j'en ai besoin.

J'utilisais une formulation temporelle. Il préfère une vision spatiale.
Comme quoi il y a toujours au moins deux façons de voir les choses...

 

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Published by Frédéric Rava - dans MéMoRiSaTiOn Espace-Temps Dialogue
22 mai 2018 2 22 /05 /mai /2018 11:00

J'allais commencer un entretien avec une enfant de 8 ans, habituée à venir, lorsque son père lui dit d'avancer la chaise. J'avais noté lors des précédentes séances que cette petite fille aime bien les explications, et répugne à exécuter des ordres dont le sens lui échappe.
- Quand tu avances ta chaise, cela permet de maintenir ta colonne vertébrale à la verticale.
- Ma colonne vertébrale ?...
- Sais-tu ce qu'est une colonne vertébrale ?
- Non.
- Et une colonne ?
- Oui.
Elle se saisit d'une feuille et d'un stylo pour me tracer deux lignes verticales parallèle comme ça : | | et, ajoutant la parole au geste, de dire :
- Voici une colonne.
Je pense alors qu'elle a déjà rencontré une vraie colonne. Mais elle ajoute un « u » au sommet de la colonne en disant :
- C'est la colonne des unités.

À l'aide d'un dictionnaire visuel, je lui fais rechercher, car elle aime bien découvrir par elle-même, ce qu'est une colonne, au premier sens du terme. Puis, avec le même livre, ce qu'est une vertèbre.
Je lui fait remarquer que les mots « vertèbre » et « vertical », comme « vertige », commencent par les mêmes lettres. Hasard ? Non, ils viennent de la même racine.
Du coup, notre colonne vertébrale fonctionne correctement lorsque les vertèbres qui la composent sont empilées, à la verticale. C'est le fameux « Tiens-toi droite ! » des parents à leurs filles. Cette injonction a donc du sens : ce n'est pas un ordre arbitraire auquel on peut se soustraire, c'est une invitation à se respecter soi-même.

Mais, au-delà de la colonne vertébrale, cette histoire me montre combien nos enfants sont perdus : nous avons oublié de leur montrer le sens premier des choses. Voilà de quoi occuper nos vacances et nos week-ends : leur montrer, et lorsque c'est possible, leur faire toucher du doigt ce que sont les choses en vrai. De quoi ensuite comprendre le code scolaire et plus tard le savoir-vivre en société. Tout un programme.

 

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10 avril 2018 2 10 /04 /avril /2018 09:00

Voici un exemple d’utilisation d’une méthode utilisable par les élèves, leurs parents, les accompagnants, les enseignants, pour commencer l’étude d’un texte et en parler.

C’est une méthode en quatre étapes, que nous pourrions appeler COSA, pour Cadrage, Objectivité, Subjectivité, Action.

 

Quel que soit son âge, l’élève lit le texte quatre fois, en quatre étapes donc. On recherche à chaque étape des éléments précis dont on dresse une liste.

Lors de la première étape, le cadrage, on recherche quels mots permettent de savoir où et quand se passe le récit.

Lors de la seconde étape, l’objectivité, on recherche tous les éléments du texte se rapportant aux univers sensoriels : visuel, sonore, tactile, gustatif, olfactif.

Lors de la troisième étape, la subjectivité, on recherche les émotions ou les idées présentes dans le document.

La quatrième étape, l’action, recherche ce que font les choses ou les êtres.

 

Voici un exemple avec une poésie tombée au bac français en 2012.

 

L'Enterrement

Je ne sais rien de gai comme un enterrement !
Le fossoyeur qui chante et sa pioche qui brille,
La cloche, au loin, dans l'air, lançant son svelte trille1,
Le prêtre en blanc surplis2, qui prie allègrement,

L'enfant de cœur avec sa voix fraîche de fille,
Et quand, au fond du trou, bien chaud, douillettement,
S'installe le cercueil, le mol éboulement
De la terre, édredon du défunt, heureux drille3,

Tout cela me paraît charmant, en vérité !
Et puis tout rondelets, sous leur frac4 écourté,
Les croque-morts au nez rougi par les pourboires,

Et puis les beaux discours concis, mais pleins de sens,
Et puis, cœurs élargis, fronts où flotte une gloire,
Les héritiers resplendissants !

Paul Verlaine, Poèmes saturniens, 1866

 

1 Trille : note musicale, sonorité qui se prolonge.
2 Surplis : vêtement à manches larges que les prêtres portent sur la soutane.
3 Drille : homme jovial.
4 Frac : habit noir de cérémonie.

 

Première étape – Cadrage (espace-temps)

se passe ce poème ? Dans un cimetière.

Quels éléments du texte nous permettent de le dire ? Bien que le terme « cimetière » soit absent, nous pouvons le deviner rapidement grâce au titre, « L'enterrement », repris dans le premier vers, et « Le fossoyeur », au second vers. Mais est-ce un cimetière catholique, protestant, juif, musulman ? « La cloche », « Le prêtre en blanc surplis », « l’enfant de cœur » permettent de savoir qu’il s’agit d’un cimetière catholique. Le poète décrivant la scène suggère que nous sommes en France, ou tout au moins en Europe.

Quand se passe ce poème ?

Avec « Tout cela me paraît charmant », l’auteur nous fait savoir qu’il assiste à la scène ou que l’action lui est contemporaine. On peut la dater d’avant 1866, date de publication du poème, ou d’une façon plus large, dans la seconde moitié du XIXe siècle.

 

Seconde étape – Objectivité (les univers sensoriels)

Recherchons les termes qui donnent à voir, comme ceux décrivant l’univers chromatique (les couleurs, valeurs...).

Nous trouvons « brille », qui indique un reflet métallique, « blanc » pour le surplis du prêtre, « rougi » pour le nez des croque-morts, « resplendissants » qui est au sens propre un terme indiquant la luminosité.

Il y a des couleurs suggérés par certains mots mais qui ne sont pas dites explicitement, comme le noir avec « au fond du trou » et « frac ». Nous reviendrons plus loin sur le contraste entre les couleurs dites et celles passées sous silence.

Pour l’univers sonore, nous avons « le fossoyeur qui chante », « la cloche » et son « trille », « le prêtre » qui « prie », la « voix […] de fille » de « l’enfant de cœur », les « discours concis » : chant, prière, voix, discours et son de cloche remplissent l’espace sonore.

Pour l’univers olfactif, peut-être que « les croque-morts au nez rougi par les pourboires » apportent l’odeur du vin par leur haleine chargée dans l’alcool bu avec les pourboires et qui rougissent leur nez.

Pour l’univers gustatif, seul le terme « pourboire » pourrait suggérer une boisson alcoolisée.

Pour l’univers tactile, nous relevons « fraîche », « chaud », « douillettement », « mol », « éboulement » qui donne une touche de rugosité atténuée par l’adjectif « mol », « édredon », « rondelets », et si nous ajoutons le ressenti corporel, nous avons également « svelte » et « élargis ».

 

Troisième étape – Subjectivité (émotions, idées, sensations)

« gai », « allègrement », « heureux », « drille », « charmant » racontent une émotion de joie, comme « cœurs élargis ».

« beaux » parle de l’idée la beauté, et nous trouvons un sentiment de fierté avec les mots « gloire » et « resplendissants ».

 

Quatrième étape – Action (actions des êtres ou des choses)

Le fossoyeur chante, et sans que le texte le dise de façon explicite, nous pouvons supposer raisonnablement qu’il manie la « pioche qui brille » pour creuser le trou.

La cloche sonne. Le prêtre prie, accompagné par l’enfant de cœur. Les croque-morts s’affairent autour du cercueil. Les héritiers, et peut-être aussi les amis du défunt, font de « beaux discours concis, plein de sens ».

 

Nous avons effectué les quatre étapes. Nous avons pu les faire grâce à notre connaissance du vocabulaire. Cela nous permet d’avoir déjà une idée, une compréhension du poème. Nous pouvons alors exprimer nos idées, nos émotions, nos sensations face à ce texte.

Jusqu’ici, nous n’avons utilisé aucune connaissance grammaticale ou technique du français. Nous pouvons toujours le faire, ou nous pouvons toujours rechercher les corrections standards disponibles, celle que peut donner un enseignant, celle que l’on trouve sur internet, et on s’apercevra que nos quatre étapes permettent de mieux comprendre ces corrections.

 

Je vais maintenant apporter une touche d’analyse grammaticale, dans la suite de celle reprise de Georges Galichet et travaillée avec les concepts que j’ai élaboré à partir de la théorie d’un de mes maîtres et amis, Antoine de La Garanderie.

 

Reprenons les quatre étapes.

La scène se passe dans un cimetière, mais ce terme lui-même n’est pas utilisé par l’auteur. À la place, il mentionne un « enterrement » et un « fossoyeur ». Recherchons les catégories grammaticales de ces mots. Ce sont bien des noms, mais alors que « cimetière » est un nom d’endroit, « enterrement » est un nom d’action et « fossoyeur » un nom d’acteur.

L’auteur a donc préféré deux éléments dynamiques, action et acteur, à un élément statique, endroit, pour nous permettre de situer le récit dans l’espace. Nous pourrions y voir la trace de la tournure de pensée du poète qui a toujours eu un faible pour une vie de bohème, mais cela serait peut-être exagéré. Nous pouvons noter cependant un premier antagonisme : au lieu de parler directement d’un endroit désignant l’absence éternelle de mouvement – le cimetière – l’auteur choisit de le cacher pour mettre en avant deux termes dynamiques.

Le poème ne donne aucune indication temporelle : ni la saison, ni l’année ne peuvent être deviner. L’action est simplement contemporaine à l’auteur, autour de 1866, date de publication du poème. En ne donnant aucune indication explicite de date, on est autorisé à croire que l’action peut se dérouler n’importe quand. Cela aide à donner l’impression d’une description hors du temps, d’une relation (le fait de relater, dire) d’un fait général voire une vérité absolue.

 

L’univers visuel raconté met en lumière le reflet métallique, les couleurs blanche et rouge, mais cache la couleur noire derrière d’autre mots. Nous retrouvons ici un second antagonisme.

L’univers tactile regorge de contrastes : le mot « fraîche » s’oppose à « chaud », le mot « éboulement » contraste avec « mol », le mot « rondelets » qui décrit une horizontalité s’oppose à la verticalité de « frac écourté », comme « svelte » contraste avec « élargis ».

Notons au passage le choix du terme « éboulement », plus dynamique que le statique « éboulis ».

L’univers olfactif compte un contraste sous-entendu : les croque-morts qui devraient avoir une haleine fétide – à croquer le gros orteil du défunt pour s’assurer qu’il est bien mort – se retrouvent à exhaler le vin rouge.

 

Ces antagonismes se prolongent au niveau émotionnel : nous voici au cimetière, lors d’un enterrement, et au lieu de rencontrer de la tristesse, de la peine ou des sentiments sombres, l’auteur nous donne des mots joyeux, de la beauté et de la lumière. Même le « défunt » devient un « heureux drille ».

 

Et le choix du dynamisme entamé avec le choix de noms d’actions au détriment d’un nom d’endroit se retrouve lors des actions : chaque personne fait quelque chose, et même les choses mentionnées comme la pioche ou la cloche sont également en mouvement.

 

L’auteur joue ainsi à cache-cache, en occultant certaines choses évidentes, comme le caractère statique du repos éternel, la couleur noire ou la tristesse, et en mettant en avant des éléments plus profonds : le dynamisme de l’enterrement, les couleurs étincelantes et la gaieté.

 

Cette analyse du texte n’a fait appel qu’à nos connaissances de vocabulaire et de grammaire. Même si on n’a pas relevé que la terre chaude recouvrait le cercueil comme une couverture douillette sur le mort, on aura relevé suffisamment d’éléments pour d’une part expliquer le texte, et d’autre part souligner qu’il y a de nombreux contrastes.

Lorsque le professeur de français racontera l’intention (présumée) de l’auteur de condamner la morale sociale comme une façade, une apparence, nous aurons des éléments pour étayer cette affirmation.

Lorsque nous apprendrons que c’est un sonnet, une forme de poésie destinée à parler d’amour ou de sentiments, nous y verrons mieux un autre clin d’œil de Verlaine à jouer avec les contrastes.

Et lorsque nous saurons que les deux quatrains de la première moitié du sonnet forment des rimes embrassées, nous sourirons de voir un autre clin d’œil du poète car nous nous souviendrons qu’en se refermant sur elles-mêmes, les rimes embrassées procurent un sentiment d’espace qui tout embrasse.

Mais tout ceci, c’est si nous avons suivi en français !... Ce qui n’est pas nécessaire pour effectuer les quatre premières étapes. Alors n’hésitez plus, parcourez vos textes à la recherche de leur lieu et leur moment, de leurs sensorialités, de leurs idées, émotions ou sensations, et de leurs actions.

Action !

 

 

 

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3 avril 2018 2 03 /04 /avril /2018 16:00

À la fin du collège ou au lycée, quand on explique un texte à l’aide des « figures de style », il ne suffit pas d’étaler sa science en utilisant des mots compliqués comme « anaphore », « assonance » ou « allitération », il faut en plus expliquer à quoi servent ces procédés. Le minimum est de dire qu’il y a une répétition, d’un même mot pour une anaphore, d’une même voyelle pour une assonance et d’une même consonne pour une allitération. Pourquoi y a-t-il répétition ? Peut-être tout simplement pour insister, mettre en relief, persuader...

Mais comment expliquer ce que font certaines « figures de style » comme le chiasme par exemple ?...
Prenons un exemple classique, pris des Plaideurs de Racine : « Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera. » et revenons à la démarche habituelle, identifier la nature de chaque mot – la catégorie grammaticale – et sa fonction, avant d’aller plus loin.
Dans cette phrase, « rit » est un verbe, comme « pleurera », et sert de groupe verbal. Quant à « vendredi » et « dimanche » ce sont des noms, qui complètent le verbe en précisant à quel moment se passe l’action, des « compléments circonstanciels de temps » si vous préférez....
« Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera » contient ainsi l’ordre : verbe, complément, complément, verbe.
Il y a une inversion : un chiasme. Avec cette figure de style, l’énoncé se referme ainsi sur lui-même et donne l’idée de quelque chose de complet, sans rien d’intéressant au dehors. Cela permet de donner l’apparence d’une vérité générale.

C’est la même chose avec les rimes embrassées et les rimes croisées.
Les rimes sont croisées quand elles alternent deux par deux, sous la forme A, B, A, B. Cela donne l’impression d’une liste sans fin, d’une énumération incomplète dont on a commencé le début sans la terminer.
Les rimes sont embrassées quand l’une encadre l’autre, sous la forme A, B, B, A. Cela donne l’impression d’un cadre, d’un ensemble, d’un stabilité.

Mes élèves auront reconnu la notion d’espace et celle de temps...

En résumé, pour identifier certaines figures de style, puis les expliquer, il est important de :
- repérer la catégorie grammaticale des mots (grille de neuf) ;
- repérer leur fonction ;
- trouver ce qui se passe dans le texte : répétition, ajout, utilisation de contraires, interruption, transfert... (grille de seize) ;
- identifier la figure de style ;
- découvrir ce qu'elle produit au niveau de la pensée.
Et bien sûr tout partager grâce au pouvoir de l’encre sur le papier !...

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